De l'overdose
Quel week-end éreintant!
L'été est revenu, mai s'annonce foisonnant. Le choix d'activités ne manque pas, entre ces belles journées ensoleillées pleines de vent qui font rêver au lac (le Bodensee et son catamaran de compet', les tentes 2 seconds et le barbecue), les anniversaires de trentenaires (c'est fou ce qu'il y a de trentenaires cette année!), l'accrobranche à côté du mignon château de Liechtenstein (3 jours après, je n'ai presque plus de courbatures), le cocktail-bar le plus fameux de notre petite bourgade... Et la chasse aux champignons.
Question sommeil, tout cela est un peu difficile à concilier.
Ainsi nous partîmes d'un bon pied, Adam, son paternel et moi-même, en direction des forêts touffues de la Schwarzwald -la Forêt Noire, donc. Alors déjà, Mr Adam Senior possède une mega grosse BM(W) qui fonctionne au gas -qui coûte beaucoup moins cher que l'essence, GPS intégré (un peu flippant à 200 km/h lorsqu'il nous en montre les fonctionnalités), conduite toute en douceur, odeur de plastique et de chien un peu, bonjour le mal de coeur. Ou alors c'était les 4 cocktails de la veille. Terribles, ces cocktails, mais vraiment: on n'y sent pas l'alcool! Bien trop sucrés... mais redoutablement efficaces, dirait-on. Je vieillis. Je n'aurais jamais crû que 4 misérables petits cocktails seraient responsables d'un barbouillage le lendemain après-midi... en voiture.
Bref, nous voici donc arrivés à quelques kilomètres de Freudenstadt. On se gare dans un chemin forestier, juste en-dessous d'un virage, et hop! manquant de nous faire écraser on traverse la route pour pênétrer dans La Forêt.
Et là... c'est l'orgie! Lactaires à n'en plus finir -alors que chez nous, une soixantaine de kilomètres à l'est, c'est la dèche sèche. Quelques bolets aussi, des pieds de moutons radioactifs, des clitocybes améthyste tout mignons tout violets, maintenant que je sais, la prochaine fois j'en ramasserai. Des fausses girolles, DAMNED mais pourquoi je n'en ai pris que quelques-unes pour les identifier? Un bolet royal, alors là miam, même crû il est délicieux.
...et des lactaires.
Je suis troublée. Certains contestent leur amertume, mais moi j'aime bien leur note poivrée. Or après deux heures de ramassage, trois paniers pleins à ras-bord... Non. Ils sentent l'anis. C'est fortement désagréable. Ou alors c'était cette amanite phalloïde, je ne sais pas, vous savez, celle qui attaque le foie et les reins et paf! en 48h on est mort?
Toujours est-il que je ne sup-por-te plus l'odeur des lactaires.
Il a fallu en sus les cuisiner le soir, enfin une partie, chez les parents d'Adam, et ô combien c'est désagréable de ne pas être dans *sa* cuisine et de ne pas en être le chef!
Poêlée de lactaires.
J'y ai rajouté un peu de sherry medium et de crème fraîche, et de l'aneth, parce que cet arrière-goût de résine, yûrk. Et puis les teutons ne mangent pas la peau des magrets parce que c'est soi-disant trop gras! Je rêve! Le meilleur!
...toujours est-il que c'est l'overdose, et que j'en ai encore deux paniers pleins et des tout mignons tout jeunes en plus, Souris me donnera les photos demain (parce que forcément j'ai perdu mon portable, et puis de toutes façons je n'ai plus de piles dans mon appareil photo, il ne me reste que celui qui va sous l'eau qui est tout pourri et dans lequel je n'arrive à bien positionner la pellicule qu'une fois sur deux, et oui j'ai oublié comment ça marche, alors que j'étais fortiche avec mon konica pop rose). Et comme je n'aime pas gâcher, il va bien falloir que j'en fasse quelque chose.
Mais alors: pourquoi n'aimé-je plus les lactaires??!
Leur seule odeur me lève le coeur, leur goût me fait grimacer.
Ca me rappelle la fois où nous étions partis en vadrouille sur une des îles du Golfe du Morbihan, et Kid devait regarder les horaires des marées, et *%$£@| qu'est-ce qu'on vous apprend à l'ENITAB bordel! Il s'était trompé, et nous restâmes prisonniers sur l'île. Sur la presqu'île, donc, devenue île par la force d'une marée montante fort malvenue. Nous nous étions alors balladés, et, le soir venant, avions ramassé des branches de pin toutes humides afin d'en faire un feu. L'odeur entêtante de la résine montant en volutes insistantes dans l'air humide du crépuscule tombant... nous trois, recroquevillés à l'abri bien innefficace d'une guérite en ruine...
...et bien les lactaires, c'est pareil. Ca sent la résine.
J'ai beau avoir déjà tout raconté sur les lactaires, je ne puis m'empêcher d'en remettre une couche. Alors en fait, normalement dans le Schönbuch on récolte des lactaires sanguins (les L. sanguifluus si prisés sur le pourtour méditerranéen) et des lactaires de l'épicéa (les L. deterrimus Gröger aussi nommés "détestables" mais que j'aime bien). Miam. Et hier, nous avons vraisemblablement ramassé des lactaires délicieux, les L. deliciosus ainsi mal nommés par Linné alors qu'il les décrivit pour la première fois en Scandinavie, croyant avoir affaire à leur cousins méditéranéens.
L'identification est indiscutable, au vu de leur pied tacheté, de leur lait orange, de leur chapeau à ondes concentriques, et puis... je fais pipi orange, et ÇA c'est caractéristique.
Allez hop! c'est pas le tout, j'ai une table basse à jeter dans le vinaigre.
Et demain, je vous raconterai l'histoire de notre passionnante recherche de colcos et de Frau Proprio qui est vraiment trop pasmaline.